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25 janvier 2013

Création d'une nouvelle pour ce blog : "Une forêt, deux êtres."

C'est avec plaisir que le fil de la création se retend, avec une nouvelle qui poursuivra le travail accompli depuis longtemps, sur la solitude, la métaphysique de l'art...

Une forêt, deux êtres

" Depuis cinq ans, peut-être six, j'ai pris l'habitude, chaque jour qu'il m'est donné de vivre, de partir le plus longtemps possible marcher en forêt. Ce n'est pas par mélancolie, ni par sportivité : écartons d'emblée les indices qui vous amèneraient à dire : "Oui, je vois, elle est rêveuse, pas dans le coup, une inadaptée" ou bien : "Elle veut faire état de ses prouesses. Qu'elle s'inscrive donc au club de randonnée !" Non, non, rien de tout ça. J'ai un bon chien : premier point. Il me laisse penser à voix haute sans me contredire : deuxième point. La forêt est très belle, pour couronner le tout et c'est gratuit. Car je ne suis pas riche et j'ai bien droit à un ou deux plaisirs, moi aussi. 

La beauté de la forêt est indiscutable. A quoi tient-elle ? J'y réfléchis sérieusement, je veux répondre. Spontanément, elle me paraît belle, sans que je me dise "elle rentre dans une composition équilibrée de lignes verticales formant avec la croûte terrestre, un angle..." ou alors, "la forêt, dans son insondable épaisseur me rappelait tout ce que l'Etre déposait de sens pour faire advenir le langage, dont le seul équivalent en plénitude serait le Silence". Oui, je connais : tentation plastique, baragouin métaphysique. Grande vogue, le baragouin métaphysique. Un grand supplétif de la parole révélée oubliée ; si Dieu s'en va, on pourra s'enivrer encore un tout petit peu (mais plus pour très longtemps), comme le drogué avec les produits de substitution, de mots comme "Présence", "Parole" "Etre (qu'il faut prononcer avec une certaine emphase en étirant le ê : double croche). Et j'oubliais, l'erreur absolue, le lyrisme : "Feuillages étoilés, bras de lune : mystères des âmes éplorées aux pieds de l'arbre. Forêt !"

Qu'on me pardonne ces instantanés de verbiage : je peux bien aller chercher ma bouffe dans une poubelle qu'on ne m'empêchera pas, à ma façon, de dire la mienne également. Alors, revenons à la forêt : dans ma situation de femme déclassée socialement, premier point, la forêt, c'est, si on regarde bien, un ordre sans hiérarchie. Une place pour chaque arbre, et jamais, on ne se dit : "tiens, celui-là ne devrait pas être là ou alors il serait bien mieux ici." Et puis, un arbre biscornu qui casse l'homogénéité de l'ensemble, attire le regard, le charme ; en bas, je veux dire en bas de la colline où les colonies humaines s'étalent, c'est le contraire. Il faut tout normer, calibrer, circonscrire. C.V, coupe de cheveux, docilité du regard, poids standard, raison modérée en climat tempéré. Deuxième point.

Vous vous apercevez que j'ai un tic de langage (premier point, deuxième point)...Ce n'est pas un tic : je marche. Une deux, une deux.

Au milieu des arbres, je ne m'éloigne pas du "réel" : au contraire, je règle mes factures du monde d'en bas, je règle mes comptes au sens propre comme au sens figuré (premier point, deuxième point). Et je garde un peu pour moi, comme un trésor, la délectation sensuelle des odeurs de pin, de thym, de terre, les scintillements dans les feuillages...chut ! Non, il y a bien quelque chose que je peux partager avec quelques humains, quelques âmes parmi nous d'une sensibilité, disons, particulière, disons, biscornue comme l'arbre qui au milieu des fiers et des droits, se tord -peut-être de douleur à son tronc défendant-pour nous montrer une version inattendue de la vie dans la forme qu'elle emprunte. La vie-même.

Voici donc le récit exact, autant qu'il se peut, d'une rencontre absolument dérangeante dont mon humble personne peut témoigner ; je vous assure qu'il se trame d'étranges choses pour notre humanité, dans cette forêt.

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Commentaires
R
Nous verrons bien, dans l'intrigue qui va "s'écorcer", n'en doutez pas, si la discussion silencieuse est toujours de mise. Je ne connais rien de la suite, mais j'ai dans l'idée qu'il y aura dans cette forêt bien plus que des murmures (et ce recours excessif au langage symbolique)...A bientôt, donc !
B
Merci, merci ! Etant moi même une amie desarbres, discutant silencieusement aveceux plus qu'avec les "humains" depuis tant d'années, je ne peux queme glisserdans le voile de ces mots d'arbres, là....
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