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14 septembre 2012

Théorie du roman, suite.

Théorie du roman, suite.

Dans les posts précédents, vous avez pu suivre ma réflexion sur l'usage du blog et son rapport à la création littéraire.

La semaine dernière en particulier, j'ai commencé à exposer le postulat à partir duquel je tente, depuis des années, de fonder une esthétique du roman qui ne se limiterait pas à l'usage plus ou moins heureux de mots propres à séduire n'importe quel lecteur impressionnable (ce qui est un minimum qui ne nous est pas toujours accordé dans le roman contemporain, convenons-en ou alors, a contrario, l'affèterie comme fond de commerce pour qui renouvelle les expériences inutiles de l'Oulipo du genre : un roman, une phrase (!) et s'attire de facto la béate et grotesque admiration de quelques belîtres intellectuels qui ne savent plus où donner de la tête pour définir la révolution d'un genre déjà mille et une fois révolutionné. Question périmée mais qui comme toutes les questions périmées conserve de forts remugles prêts à empuantir à chaque instant, l'air déjà saturé du paysage intellectuel français).

Non. Si question esthétique il y a, ce ne doit pas précisément être pour jouer à ce qui est déjà en cours depuis trop longtemps chez certains écrivains prétendument esthètes, érudits, prêtres de la Bôté (bien arrondir le o en buvant une gorgée du meilleur vin) qui ne sont, dans les faits de leur sacerdoce, que de piètres onanistes (qui se rêvent désirés, peut-être le Désir incarné lui-même). Ne citons plus les Sollers, les Quignard, et même les Millet, ces gardiens du temple qui n'ont su garder qu'une très haute estime d'eux-mêmes en guise de temple et se servant de la Culture comme d'un linge sale prêt à recueillir leurs matières grisonnantes à défaut d'être grises. J'ai déjà dit ce que je pensais dans un post qui s'intitule "crash-test de l'écrivain" de ces pleutres confinés à Saint Germain.

Plus simplement, une esthétique du roman peut définir un projet, qui sans être démesuré (n'allons pas nous imaginer que la littérature détient le pouvoir de défendre une civilisation occidentale bien mal en point : c'est lui prêter trop et risquer de la figer dans un rêve d'absolu qu'elle n'atteindra pas, ou alors exceptionnellement), va conférer un sens à un travail de toute une vie : chercher et tenter d'approcher par le langage tout ce qui fait de l'existence humaine une chaîne d'accidents. Organiser quelques éléments d'un chaos : c'est à mon avis ce qu'un roman contemporain peut viser de mieux en balayant le plus de paradigmes possibles. Le reflet du réel ne suffit pas, dire le désordre ne suffit pas ; il faut à chaque instant dans un roman explorer comment une pensée, une émotion se positionne dans les coordonnées du réel. Ces coordonnées se déclinent en plusieurs paramètres : l'émotion immédiate, l'émotion qui se pense comme une émotion, l'émotion qui se modifie en présence d'un tiers, l'émotion qui émane de la stimulation extérieure et quelle extériorité...Et pour relier ces données éparses, on ne se privera pas de lire les travaux des  philosophes, neurologues, des sociologues, des psychologues, des artistes en tout genre. Ainsi, on pourra peut-être, sans démesure, parvenir à un résultat passionnant tout en s'évitant les écueils des récits anecdotiques qui ne tentent jamais d'offrir à leur matière, une mise en perspective.

Il me semble que trop d'écrits aujourd'hui ne répondent à aucune nécessité. Quand je dis "nécessité", c'est cet ordre pensé de l'oeuvre qui, au fil de la création, se rattache à tous les autres maillons de l'oeuvre d'un même auteur, dans une continuité qui fait cohésion et cohérence. L'absence d'unité dans l'oeuvre d'un artiste constitue un problème majeur et un aveu grave d'impuissance : l'artiste, qui par son surplomb devrait pouvoir donner à voir et peut-être même à comprendre un tout petit peu ce qui fait "chaos", ne fait, en multipliant des petits récits, que reproduire l'état dans lequel le lecteur est lui-même avant de plonger dans son oeuvre, sans en modifier, après lecture, la vision. C'est ce que j'appelle "in petto", la littérature pour rien.(on peut évoquer ici Nothomb qui ne se lasse apparemment jamais d'écrire ses insignifiantes oeuvrettes sans en imposer aucune).

Bien sûr, je pense à des monuments comme la Comédie humaine, bien sûr. Mais sans avoir le génie de Balzac, on peut quand même penser à faire sérieusement son travail.

Avant d'écrire quoique ce soit, dans ma logique du roman, on procède par recoupements successifs. Un thème nous intéresse ? On le scrute sous toutes les faces, on le problématise, on affine la problématique en la nourrissant de toutes les sources de lumière existantes, on se fait "humaniste" au meilleur sens du terme.

La question maintenant se pose : en quoi mon travail de romancière tente-t-il de répondre à cet impératif ? En quoi chaque roman que je conçois tente-t-il de s'intégrer dans une oeuvre qui fait sens "intra" et "extra" ?  

Je réserve la réponse au prochain post qui détaillera, pour chacun de mes romans, la nature de cet effort.  

 

    

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